VOUS AVEZ DIT ESPACES COMMUNS ?

2021. Communication ” espaces publics / espaces communs : leçons de la commune de Bauduen à partir de l’atelier de projet hors les murs ” présentée au colloque international “vous avez dit espaces communs ?: Nouvelles pratiques, éthiques et formes sensibles de gouvernance de la ville et du territoire.”

PAR FLORENCE SARANO

enseignante-chercheure TPCAU

ENSA MARSEILLE

entre deux espaces publics


VOUS AVEZ DIT ESPACES COMMUNS ? Nouvelles pratiques, éthiques et formes sensibles de gouvernance de la ville et du territoire.

COLLOQUE INTERNATIONAL

20 21 22 novembre 2021 – ENSA SAINT ÉTIENNE

Article publié dans les actes

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Dans le cadre d’une exploration de la définition des “biens communs” poser la question de la place des espaces publics dans les territoire ruraux est l’axe dans lequel est inscrit cette communication.

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Les espaces communs et l’avenir des territoires

L’exemple d’une recherche-action de l’atelier des horizons possibles à l’ensa-Marseille.

Florence Sarano

Comment faire face aujourd’hui aux enjeux des centres-bourgs, sans interroger et renouveler les synergies entre les trois pratiques : la recherche, la pédagogie et les métiers ?

L’atelier de projet de master « les horizons possibles » déploie une démarche spécifique de « recherche-action » hors les murs dans les communes rurales du département du Var. Nous interrogeons à partir de ces territoires, d’une part, leurs possibilités d’avenir dans l’incertitude des défis en expérimentant des démarches et en créant des outils, et d’autre part, en élargissant les rôles des architectes. Ainsi, nous retissons ensemble les notions d’imaginaire, de responsabilités et de compétences avec la fil de la notion d’engagement pour un nouveau récit définissant nos rôles de concepteurs d’espaces et de modes de vie dans les territoires ruraux.

« Dans la diversité de ces propositions architecturales, nées de cette formidable expérience d’immersion, je distingue peut–être un trait commun l’invention ou la réinvention de lieux communs, d’espaces partagés ce que les romains appelaient l’Ager publicus[1].»)

Le statut des espaces communs dans le processus de conception architecturale est le vecteur de recherches développées à l’école d’architecture de Marseille en interactions avec des « ateliers hors-les-murs » situés dans les territoires ruraux[2]. Ces travaux s’appuient depuis cinq ans sur des temps collectifs d’immersions dans les campagnes. Associant l’épreuve physique du parcours des lieux à la rencontre des acteurs et des habitants, nous invitons aussi à nous rejoindre des chercheurs multidisciplinaires pour croiser ensemble nos regards sur les différents enjeux rencontrés lors de nos cheminements. Cette démarche articule problématiques théoriques et propositions architecturales considérées comme des hypothèses pour imaginer l’avenir de ces petites communes. Les travaux sont ensuite à chaque fois rassemblés dans une publication[3] pour être laissés en partage aux acteurs locaux. Ils sont également analysés pour alimenter la construction pédagogique de l’immersion suivante et irriguer les recherches thématiques et les processus de conception[4].

Dès le début de ce travail, la place des espaces communs a donc été un levier actif pour imaginer les horizons possibles des territoires étudiés. Tout a commencé avec l’investigation des trois petites îles d’or du Parc national de Port-Cros. C’est le Président du CESC (Conseil économique, social et culturel), habitant de Porquerolles qui reliant tous les projets, pointe dans l’ouvrage rassemblant les travaux, l’importance de la « réinvention » de ces espaces.

Les liens entre le développement de ces petites entités territoriales et la nécessité d’espaces communs pour rassembler les acteurs et penser collectivement leur futur, ont donc été très tôt revendiqués.

 Aujourd’hui, nous développons toujours l’hypothèse que les espaces communs[5] sont aussi des lieux pour imaginer l’avenir des territoires ruraux à partir d’une vision holistique des biens communs territoriaux [6] (Magnaghi, 2014), (Ostrum, 1990). En conséquence, en tant qu’architectes il est essentiel d’interroger le statut particulier de ces espaces communs et les conséquences sur leur conception spatiale (formes, matérialité, composition) ainsi que les effets sur les savoirs constructifs locaux.

Comment ces projets d’espaces communs, avec leurs qualités architecturales participent-ils, à redéfinir la notion de biens communs spécifiques aux territoires ruraux ?

Comment, tout aménagement urbain et paysager mais aussi chaque projet architectural peut-il contribuer activement au « pouvoir d’agir en commun », et de gouvernance de ces biens communs selon Ostrum (1990) dans ces territoires ?

AXE : RURALITÉS CONTEMPORAINE ET ESPACES PARTAGÉS

Ruralités contemporaines et espaces partagés : enjeux, imaginaires, pouvoirs d’agir. Dans une optique post-capitaliste, s’intéresser au statut des territoires ruraux contemporains constitue une occasion pour poser sous un nouveau jour la question des complémentarités ville-campagne, dans une optique de bien commun.

De nombreuses formes d’action parcourent les territoires hors de la métropolisation, dont il est opportun de mesurer la portée en termes d’imaginaire, de rapport aux ressources, de pouvoir d’agir (capabilities). Dans ce cadre, quel est le statut de l’espace public dans les territoires situés en dehors d’un référentiel urbain ou métropolitain ?

De quelle manière l’intervention sur ses formes et ses matérialités, jointe à un questionnement sur les processus de projet (chantiers participatifs, initiatives habitantes, processus de co-design) et le statut de l’espace (au-delà de la dichotomie public-privé) constitue-t-elle une occasion pour poser les bases d’un travail sur les biens communs ?

jardins ouvriers à Saint Étienne photo S. Segapelli
QUEL CONCEPT D’ESPACE COMMUN ? GILDA FARREL

Nous sommes dans un moment crucial d’épuisement d’une certaine idée d’autonomie, exemptée de liens avec l’espace et fondée sur la capacité individuelle de choisir et consommer dans un marché global. Dans ce contexte, la question politique essentielle qui se pose est : comment allons-nous organiser notre vie autour d’une nouvelle conception des espaces ou bien comment allons-nous rétablir une relation avec les espaces qui ouvrent à la durabilité de l’Humanité et de la Terre ?

Dans cette démarche, il est important de réfléchir au concept d’espace commun à développer, représenter et faire comprendre, et surtout aux horizons que nous souhaitons franchir et sur le type d’action que nous voulons induire ou influencer.

Parmi les options pour définir ce concept, il sera abordé : nomadisme vs. sédentarisation; société de masses vs. élites; socialisation vs. symbiose avec les autres et la nature ; nouveauté dans l’exercice de la propriété ou nouveauté dans l’exercice de la démocratie et du soin ». Présentation de la conférence.

ARGUMENTAIRE DU COLLOQUE

Les réseaux de collaboration civique sont aujourd’hui déterminants dans la construction sensible d’un regard différent sur la ville post-industrielle et les principes qui guident ses transformations, notamment via les espaces publics. Interroger les espaces de vie de quartier devient alors une manière de comprendre le rôle des nouvelles formes de gouvernance dans la définition d’un horizon post-capitaliste, ouvert à l’exploration d’alternatives soutenables de co-design et co-construction.

Quels régimes de partage, quelles connaissances et quelles pratiques de citoyenneté active se profilent comme éléments d’innovation ?

Le rôle des cultures urbaines a changé dans le temps, dans les dernières décennies l’institution des Commons comme mode de résistance à la privatisation exaspérée du capitalisme et la structuration sociale selon une forme hétérarchique (Citton 2018) dotée d’une pluralité des systèmes de valeur, construisent un paysage commun intéressant, à explorer.

Turin a été choisie comme cas d’étude pour la multiplicité des chemins de transformation pris en réponse aux processus de désurbanisation et de paupérisation des territoires post-industriels. L’adoption d’une série de programmes de régénération urbaine, déjà à partir des années 1990, et le lancement récent du projet européen Co-City, manifestent une volonté de rénovation des dispositifs de relation entre les citoyens et l’administration.

D’autres villes européennes (Berlin, Vienne, Bruxelles, Grenoble, Athènes, etc.) et extra-européennes (Medellin, Détroits, etc.) sont également en train d’expérimenter de nouveaux protocoles d’intervention dans les espaces de vie de la ville, qui sont à la fois terrains de rencontre, de partage, d’innovation urbaine ainsi que réserve de la pluralité des formes sensibles de résistance et de remise en question des politiques d’esthétisation.

Les pratiques basées sur la collaboration et la coopération peuvent produire  de nouvelles formes d’organisation spatiale, de relations sociales et de nouvelles manières de concevoir la vie quotidienne. Une forme différente de créativité est en train de se configurer grâce aux pratiques du Commoning ; d’après Stavros Stavrides ce sont ces pratiques, qui ne sont pas nécessairement nouvelles mais chargée d’un nouveau sens, qui ouvrent l’univers des possibles : « Emergent communities of creators and users of city space: insn’it this a prospect that transform city space to common space, to space-as-commons?” (Stavrides, 2015)

Deux dimensions expriment les valeurs de l’urbanité aujourd’hui, plus que toute autre, ce sont les cultures publiques et les cultures du projet, elles sont interreliées sur la base de stratégies et d’objectifs qui se focalisent de plus en plus sur la gestion subsidiaire des biens communs. L’imaginaire urbain collectif est davantage sollicité à se projeter dans des nouveaux scenarios de partage et vers la co-création de paysages communs. Dès les années 90 et surtout pendant les années 2000, la conception du projet urbain a dû revenir sur la notion de « commun » pour repenser les biens autrement qu’en termes d’opposition public/privé. Ce clivage est actuellement remis en cause par les nouveaux dispositifs mis en place par les politiques publiques associées au renouvellement de la ville et de ses espaces de partage.

Les mesures qui favorisent la vie collective, avec ses ambiances et ses qualités (partage, solidarité, proximité), trouvent leur origine dans la ville ouvrière à Saint-Etienne comme à Turin : l’auto-organisation, l’économie collaborative, les logiques de percolation public-privé et, très concrètement, les jardins potagers / jardins ouvriers, les maisons de quartier / amicales laïques, les tables sociales / ateliers participatifs.


ATELIER COMMUNAUTÉS RURALES

Introduction et coordination Luna d’Emilio [Réseau ERPS]

Sara Basso, L’arte di coltivare la condivisione. Costruire spazi comuni per una nuova ’città pubblica’ [Università di Trieste]

Cristina dalla Torre, Andrea Membretti, Elisa Ravazzoli, Pratiche di commoning e beni comuni nelle aree montane alpine italiane: il dilemma dell’accesso alle risorse in una società in mutamento [Eurac Research Bolzano]

Florence Sarano, Les espaces communs et l’avenir des territoires [ENSA Marseille-Luminy]

Clémence Dupuis, Espace commun, espace ordinaire ? Composer spatialement avec l’hostilité pour révéler un commun territorial, le cas des espaces publics du centre-bourg de St Eloy-les-Mines (63), [AECC – ENSA Grenoble]

Romeo Carabelli, George-Henry Laffont, Vers des communs territoriaux en Val de Loire ? Retours sur des expériences de caractérisation de ressources et de modalités d’action pour faire territoire autrement [Université de Tours]

Publication des actes du colloque.

RESPONSABLES SCIENTIFIQUES

Silvana Segapeli [ENSASE] avec Daniela Ciaffi [Politecnico di Torino/DIST, Labsus]

COMITÉ D’ORGANISATION

Silvana Segapeli [ENSASE] en collaboration avec les responsables des sessions thématiques :
Francesca Bragaglia [Politecnico di Torino/DIST] Daniela Ciaffi [Politecnico di Torino/DIST] Luna d’Emilio [ENSAL, Réseau ERPS-ENSASE] Benedetta Giudice [Politecnico di Torino/DIST] Kader Mokkadem [ESADSE] Maria-Anita Palumbo [ENSASE] Davide Rolfo [Politecnico di Torino/DAD] Magali Toro [ENSASE] Marco Santangelo [Politecnico di Torino/DIST] Angioletta Voghera [Politecnico di Torino/DIST]

COMITÉ SCIENTIFIQUE

Gregorio Arena [LABSUS -Laboratorio per la Sussidiarietà] Jean Attali [ENSA Paris Malaquais] Valter Cavallaro [Città di Torino, Progetto CoCity] Benjamin Coriat [Les Économistes Atterrés] Daniela Ciaffi [Politecnico di Torino/DIST, Labsus] Luna d’Emilio [ENSAL, Réseau ERPS-ENSASE] Gilda Farrell [Division pour le développement
de la cohésion sociale, Conseil de l’Europe] Giovanni Ferrero, [Città di Torino, Progetto CoCity] Ugo Mattei [Università di Torino] Danièle Méaux [UJM-CIEREC] Maria-Anita Palumbo [ENSASE] Pascale Pichon [UJM- Centre Max Weber] Angioletta Voghera [Politecnico di Torino/DIST] Chris Younès [ESA, Paris]

SOUTIEN

Ministère de la Culture,
Région Auvergne-Rhône-Alpes,
Université Jean Monnet,
Politecnico di Torino,
ENSASE

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