ET DEMAIN ON FAIT QUOI ?

2020. Participation à l’exposition de la contribution à l’appel lancé en pleine pandémie covid par le Pavillon de l’Arsenal “Et demain on fait quoi?”. Proposition retenue “Le jour d’après: comment enseigner l’architecture ?”. Pour débattre sur les sujets qui ont émergés dans le cadre de cette situation sanitaire et des confinements successifs.

PAR FLORENCE SARANO

enseignante-chercheure TPCAU

ENSA MARSEILLE

EXPOSITION

ET DEMAIN ON FAIT QUOI ?

16 juin – 13 septembre 2020

PAVILLON DE L’ARSENAL – PARIS


M

Cette exposition évolutive, a souhaité permettre à chacun de continuer à partager et débattre des problématiques urbaines déjà existantes ou inédites révélées par la crise sanitaire.

LE JOUR D’APRÈS : COMMENT ENSEIGNER L’ARCHITECTURE ?
RESPONSABILITÉS / POURQUOI CONCEVOIR ?

Florence Sarano

Le projet n’est pas seulement une réalisation concrète il est aussi une visée et permet de trouver le sens de ce que l’on fait.

Si « l’architecture classique » transformait le monde afin de le rendre favorable à l’homme » selon Yona Friedman, aujourd’hui une autre alternative est nécessaire « transformer la manière dont l’homme utilise les choses existantes dans une co-existence pacifique ».
Cette ambition implique des manières de penser l’acte de bâtir qui résonnent avec les changements de paradigme (climat, ressources, pollutions, équité, sobriété…) et qui interrogent la nature de nos relations avec notre planète. L’architecte en tant qu’acteur admet désormais de nouvelles responsabilités mais qui sont aussi de nouvelles manières de concevoir, de bâtir et finalement de considérer la complexité du monde.
Ces responsabilités, que nous qualifions d’opportunes car elles offrent la chance de rencontrer le monde et les autres sous une forme plus complète, nous permettent aussi, -au delà de répondre de ses actes (en référence à Aristote)-, de faire prendre conscience de ce qui est sous sa responsabilité dans le processus du projet.

Ces responsabilités sont aussi assumées par les écoles, alors comment peuvent-elles y contribuer activement ?
1. en participant à faire émerger des questionnement, des postures et des projets critiques renouvelant les rôles d’une profession en mutation et qui cherche à définir sa participation à ces jours d’après.
2. en développant diverses expérimentations et immersions « in situ » reliées à des recherches-actions pour ces « étudiants de l’Anthropocène ».

En effet ce sont ces étudiants qui sont les plus concernés par la recherche de perspectives futures et qui cependant font face à la disparition de toute certitude et à la multitude de récits qui se perdent dans les intérêts contradictoires de notre époque. Pourtant c’est dans l’espace des tensions entre protection et développement, économie et éthique, durabilité et réversibilité, nature et installations humaines, habiter et se confiner, dans ces intérêts contradictoires que se situe le projet architectural.

RECHERCHES ET PROJET / QUAND COMMENCE LE PROJET ?

Cette « recherche-action d’avenir » repousse les frontières de notre discipline et déplace les limites des pratiques et des métiers pour nous interroger collectivement enseignants, chercheurs et étudiants : désormais où commence le projet d’avenir ? 
Je pose deux hypothèses complémentaires :
1- il commence par faire émerger des « situations de projet » en développant des scénarios stratégiques à l’échelle du grand territoire, puis avec l’inscription de l’édifice localement et en résonnance avec les défis globaux contemporains.
2- pour cela déployons notre culture architecturale et relisons notre histoire commune afin de repenser l’édifice comme un « activateur  de synergies».


Ainsi nous pourrions réinterpréter l’injonction de Vitruve doublement:
Firmitas par matière et réversibilité – Utilitas par climat et milieux – Venustas par dispositif et soin. 

ÉLARGIR LES RÔLES DES ARCHITECTES / OÙ COMMENCE LE PROJET ?

Si le projet commence dans la complexité du monde et la conscience des synergies, comment enseigner l’élargissement des rôles ?  
Peut-être commençons à tisser une généalogie de certaines expériences pédagogiques pour les relier au jour d’après : des constructions annuelles de Taliesin à celles de  Rural studio, des projets d’étudiants de Tyin à ceux de RUF, de Talca au Black mountain collège, de la régional tower de Geddes aux ateliers d’Heringer à Harvard …

Elles invitent à :
–  construire ensemble comme un processus fédératif de groupe,
–  éprouver les lieux pour prendre conscience des milieux,
–  rencontrer les situations extrêmes de conflits,
–  se saisir de la fragilité des êtres pour repenser nos manières d’habiter avec légèreté
–  s’immerger à la rencontre des habitants afin de savoir pour qui sont les projets
–  se poser face à l’autre pour se définir mais pas s’opposer, faire avec
–  partir ailleurs et aussi investir le local autour de soi
–  à se saisir d’autres notions pour nommer et  considérer chacun
–  imaginer des espaces vecteurs de liens et déclencheurs d’actions collectives
Finalement tous ces formats d’enseignements sortent hors les murs pour reformuler les questions du projet conduisant à élargir les rôles et les compétences des architectes.
Ils invitent à l’expérimentation, à prendre position pour regarder d’autres horizons, ils embarquent d’autres participants inattendus et certains étudiants continuent leurs projets les jours d’après leurs diplômes.

LES MOTIVATIONS DU JOUR D’APRÈS / LA PARTICIPATION DES ÉCOLES D’ARCHITECTURE ET DE PAYSAGE

Aujourd’hui, (à l’heure de ce premier jour d’après -initiateur de nombreux autres-), dans les lettres de motivation des étudiants cette conscience de la suite à imaginer collectivement les conduit à attendre aussi de leurs écoles qu’elles leur permettre de le faire de différentes manières. Mais comment concevoir cet avenir sinon en y participant ?


En effet, notre responsabilité est aussi d’être des forces de propositions, des moteurs d’actions, des chercheurs, des concepteurs qui investissent toutes les situations de conflits pour en faire des situations de projets collectifs pour tous les autres jours d’après.

ARGUMENTAIRE DE L’EXPOSITION

Rassemblant près de 200 contributions d’architectes, étudiants, ingénieurs, paysagistes, promoteurs, professionnels de l’immobilier, urbanistes, usagers…, l’exposition forme un corpus de réflexions stimulantes, parfois dissonantes, témoin en cela de nos interrogations urbaines contemporaines. Classées chronologiquement, sans filtre, telles qu’elles se sont présentées sur la plateforme, ces visions donnent à voir et à lire les préoccupations de chacun pour les partager avec tous. Logement et évolutivité, métropole et gouvernance, mobilité et solidarité, climat et ruralité, grenier et cimetière, carbone et construction, vitesse et proximité, distance aux autres et au monde… les thèmes abordés convoquent les grands enjeux de la fabrication de la ville. Conçue comme une manifestation dynamique et participative, « Et demain on fait quoi ? » s’est progressivement enrichie des contributions postées jusqu’au 30 juin 2020.


CATALOGUE DE L’EXPOSITION

Rassemblées dans cet ouvrage, les 198 contributions témoignent, dans un contexte particulier, des préoccupations et aspirations de chacune et chacun pour transformer et adapter la ville de ses architectures. L’ensemble forme un corpus de réflexions stimulantes, parfois dissonantes, témoin en cela de nos interrogations urbaines contemporaines. Classées chronologiquement, sans filtre, telles qu’elles sont parvenues, elles révèlent des questionnements déjà existants ou font surgir des problématiques inédites.
Les enjeux premiers de solidarité et de défi climatique se conjugent avec les questions de proximité, d’autour de soi, d’espaces et de temps: logement et évolutivité, métropole et gouvernance, bureau et réversibilité, commun et ruralité, grenier et cimetière, carbone et matérialité, vitesse et mobilité, distances aux autres et au monde…
Alors que les modes de vies urbains, les conditions de fabrication de la ville, tous comme leurs usage et les façons d’habiter sont pour certains brutalement obsolètes, architectes, artistes, designers, étudiants, ingénieurs, paysagistes, promoteurs, professionnels de l’immobilier, urbanistes et usagers inventent d’autres manières de faire la ville.

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